Des marchands sur le Fleuve Jaune
Marco Polo (1254-1324), Le Devisement du monde ou Livre des Merveilles
Récit de 1299, copié à Paris vers 1410-1412.
Enluminure par Maître d’Egerton. Manuscrit sur parchemin, 299 feuillets, 42 x 29,8 cm
BnF, département des Manuscrits, Français 2810, fol. 51
© Bibliothèque nationale de France
Le Huang He (Fleuve Jaune), rivière irrigant le nord de la Chine, est une importante voie de communication dans l’Empire de Kubilaï, qui permet d’irriguer tout l’arrière-pays et d’exporter les marchandises des fertiles plaines du nord vers l’Outre-mer.

Il parle du fleuve Caramoran et de la grande cité de Casiauf
Après avoir chevauché vingt milles vers l'ouest au départ du château du roi d'Or, on arrive au grand fleuve Caramoran. Il est si large et si profond qu'aucun pont ne peut le traverser. Il se jette dans la mer Océane qui fait le tour de la terre. Un bon nombre de cités et de châteaux commerçants le bordent. Il y a en effet abondance de gingembre et de soie dans la contrée, et aussi une merveilleuse multitude d'oiseaux de toutes sortes. On peut y acheter trois faisans pour un gros d'argent de Venise. À deux jours de là, vers l'ouest, on trouve la splendide cité de Casiauf. Les gens y sont tous idolâtres, comme d'ailleurs tous les habitants du Catay. La cité fait grand commerce d'étoffes d'or et de tissus de toutes sortes. Il n'y a rien d'autre à mentionner. Avançons donc, et parlons de la capitale du royaume, la belle cité de Quengianfu.

Il parle de la cité de Quengianfu
Depuis la cité de Casiauf, l'on chevauche huit jours en direction de l'ouest, traversant des cités et des châteaux très commerçants et vivant d'artisanat. Il y a là nombre de jardins, de vergers et de champs magnifiques où poussent les mûriers, ces arbustes dont les feuilles nourrissent les vers à soie. Les gens sont tous idolâtres. On y chasse abondance de bêtes et d'oiseaux de toutes sortes. Après huit jours de route, l'on atteint donc la magnifique cité de Quengianfu. C'est la capitale du royaume de Quengianfu. C'était autrefois un grand et superbe royaume, sous l'autorité de rois vaillants et grandioses. Le Grand Khan l'a donné à son fils Manglay ; il en est maintenant roi et seigneur. La cité vit de commerce et d'artisanat. Les habitants y tissent avec la soie qu'ils ont en très grande abondance toutes sortes d'étoffes de soie et d'or. Ils y fabriquent également divers équipements pour les armées du Grand Khan. La ville dispose à bon marché de tout ce qui est nécessaire. Elle est orientée vers l'ouest. Ses habitants sont idolâtres. Le palais du seigneur Manglay, le fils du Grand Khan, est à l'extérieur de la ville. Il est splendide. Il est au centre d'une grande plaine où coulent nombre de rivières, de lacs et de fontaines, et entouré d'un solide et épais mur de cinq milles de long tout recouvert de marbre. Nul ne saurait ordonner un palais plus magnifique, avec toutes ses salles et ses chambres ornées de belles peintures et entièrement dorées. Ce Manglay gouverne très bien son royaume avec justice et grande sagesse ; il est adoré de son peuple. Les armées campent autour du palais et y chassent avec plaisir le gibier. Quittons cela et parlons maintenant de la province de Cuntim, très engagée à l'intérieur des montagnes, et dont la route recèle bien des dangers.
 
 

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