J'ai fait de la contrebande.....
La pocharde
Germinie en robe de bal
Mlle de Varandeuil au cimetière
Mademoiselle de Varandeuil
Le sacrifice de Germinie pour Jupillon
Germinie Lacerteux, croquis de scène
Edmond de Goncourt (1822-1896), auteur ; Jules de Goncourt (1830-1870), auteur ; Théophile Thomas (1846?-1916), peintre, 1903.
BnF, département des Arts du spectacle, FOL-O ICO-410 (2)
© Bibliothèque nationale de France
Germinie s’échine à rassembler de l’argent pour éviter à son amant Jupillon de partir à l’armée… quelques temps plus tard, elle découvrira qu’il fréquente une autre femme.

« De huit jours, Germinie ne remit pas les pieds dans la boutique.
Les Jupillon, ne la voyant pas revenir, commençaient à désespérer. Enfin, un soir, sur les dix heures et demie, elle poussa la porte, entra sans dire bonjour ni bonsoir, alla à la petite table où étaient assis la mère et le fils à demi sommeillants, posa sous sa main, fermée avec un serrement de griffe, un vieux morceau de toile qui sonna.
– Voilà ! fit-elle.
Et, lâchant les coins du morceau de toile, elle répandit ce qui était dedans il coula sur la table de gras billets de banque, recollés par derrière, rattachés avec des épingles, de vieux louis à l'or verdi, des pièces de cent sous toutes noires, des pièces de quarante sous, des pièces de dix sous, de l'argent de pauvre, de l'argent de travail, de l'argent de tirelire, de l'argent sali par des mains sales, fatigué dans le porte-monnaie de cuir, usé dans le comptoir plein de sous, de l'argent sentant la sueur.
Un moment, elle regarda tout ce qui était étalé comme pour se convaincre les yeux ; puis avec une voix triste et douce, la voix de son sacrifice, elle dit à Mme Jupillon :
– Ça y est. C'est les deux mille trois cents francs… pour qu'il se rachète.
– Ah ! ma bonne Germinie ! fit la grosse femme en suffoquant sous une première émotion ; et elle se jeta au cou de Germinie qui se laissa embrasser. Oh ! vous allez prendre quelque chose avec nous, une tasse de café…
– Non, merci, dit Germinie, je suis rompue. Dame !
j'ai eu à courir, allez, pour les trouver… Je vais me coucher… Une autre fois…
Et elle sortit. […]
Elle avait agi d'un premier mouvement. On lui aurait dit de mourir pour qu'il ne partît pas, qu'elle fût morte. L'idée de le voir militaire, cette idée du champ de bataille, du canon, des blessés, devant laquelle, de terreur, la femme ferme les yeux, l'avait décidée à faire plus que mourir à vendre sa vie pour cet homme, à signer pour lui sa misère éternelle ! »
 
 

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