Carthage, ruines de l'ancien port
L'Algérie photographiée : Province d'Oran
Félix-Jacques-Antoine Moulin (1802-1879), photographe, 1856-1857.
1 album : 84 photographies positives sur papier albuminé : d'après négatif sur plaque de verre au collodion ; 36 x 55 cm (album)
BnF, département des Estampes et de la Photographie, RESERVE BOITE FOL-OZ-110 (1)
© Bibliothèque nationale de France
« Ce spectacle de Carthage irritait les Barbares. Ils l'admiraient, ils l'exécraient, ils auraient voulu tout à la fois l'anéantir et l'habiter. Mais qu'y avait-il dans le Port-Militaire, défendu par une triple muraille ? Puis, derrière la ville, au fond de Mégara, plus haut que l'Acropole, apparaissait le palais d'Hamilcar.
Les yeux de Mâtho à chaque instant s'y portaient. Il montait dans les oliviers, et il se penchait, la main étendue au bord des sourcils. Les jardins étaient vides, et la porte rouge à croix noire restait constamment fermée.
Plus de vingt fois il fit le tour des remparts, cherchant quelque brèche pour entrer. Une nuit, il se jeta dans le golfe, et, pendant trois heures, il nagea tout d'une haleine. Il arriva aux bas des Mappales, il voulut grimper contre la falaise. Il ensanglanta ses genoux, brisa ses ongles, puis retomba dans les flots et s'en revint.
Son impuissance l'exaspérait. Il était jaloux de cette Carthage enfermant Salammbô, comme de quelqu'un qui l'aurait possédée. Ses énervements l'abandonnèrent et ce fut une ardeur d'action folle et continuelle. La joue en feu, les yeux irrités, la voix rauque, il se promenait d'un pas rapide à travers le camp ; ou bien, assis sur le rivage, il frottait avec du sable sa grande épée Il lançait des flèches aux vautours qui passaient. Son cœur débordait en paroles furieuses. »

Gustave Flaubert, Salammbô, chapitre IV, 1862.
>Texte intégral dans Gallica : Paris, Charpentier, 1879
 
 

> partager
 
 

 
 

 
> copier l'aperçu