La Duchesse
La Chartreuse de Parme
Stendhal (1783-1842), auteur ; Valentin Foulquier (1822-1896), graveur, Paris, Ed. L. Conquet, 1883.
2 vol. (XXIX-386, 432 p.) : fig. ; in-8
BnF, département Littérature et Art, 8-Y2-6544 (2)
© Bibliothèque nationale de France
Malgré sa situation de successeur de l’évêque de Parme, Fabrice, tout en fréquentant la cour et les salons, a vite pris pour maîtresse une actrice désargentée. Sans le vouloir, il a aussi éveillé la jalousie du comte Mosca, désespérément amoureux de la Sanseverina, qui de son côté refoule tant bien que mal l’amour incestueux qu’elle porte à son neveu. Quand Fabrice se bat et finit par tuer un rival amoureux, elle cherche désespérément à le faire acquitter, aidée par Mosca qui désire désespérément l’épouser. Après s’être d’abord enfui, Fabrice décide de revenir à Parme pour y être jugé. Il est immédiatement arrêté par les ennemis politiques du comte Mosca, qui cherchent à instrumentaliser l’affaire pour obtenir un changement de gouvernement. Fabrice est emprisonné au sommet de la sinistre tour Farnèse, tandis que la Sanseverina se résout à quitter Mosca et à utiliser sa connaissance de la cour et l’influence qu’elle a sur le duc pour faire libérer son neveu.

Chapitre seizième
« Mais pour le moment, nous sommes obligés de laisser Fabrice dans sa prison, tout au faîte de la citadelle de Parme ; on le garde bien, et nous l’y retrouverons peut-être un peu changé. Nous allons nous occuper avant tout de la cour, où des intrigues fort compliquées, et surtout les passions d’une femme malheureuse vont décider de son sort. En montant les trois cent quatre-vingt-dix marches de sa prison à la tour Farnèse, sous les yeux du gouverneur, Fabrice, qui avait tant redouté ce moment, trouva qu’il n’avait pas le temps de songer au malheur.
En rentrant chez elle après la soirée du comte Zurla, la duchesse renvoya ses femmes d’un geste ; puis, se laissant tomber tout habillée sur son lit : Fabrice, s’écria-t-elle à haute voix, est au pouvoir de ses ennemis, et peut-être à cause de moi de ses ennemis, et peut-être à cause de moi ils lui donneront du poison ! Comment peindre le moment de désespoir qui suivit cet exposé de la situation, chez une femme aussi peu raisonnable, aussi esclave de la sensation présente, et, sans se l’avouer, éperdument amoureuse du jeune prisonnier ? Ce furent des cris inarticulés, des transports de rage, des mouvements convulsifs, mais pas une larme. Elle renvoyait ses femmes pour les cacher, elle pensait qu’elle allait éclater en sanglots dès qu’elle se trouverait seule ; mais les larmes, ce premier soulagement des grandes douleurs, lui manquèrent tout à fait. La colère, l’indignation, le sentiment de son infériorité vis-à-vis du prince, dominaient trop cette âme altière.
Suis-je assez humiliée ! s’écriait-elle à chaque instant ; on m’outrage, et, bien plus, on expose la vie de Fabrice et je ne me vengerai pas ! Halte-là, mon prince ! vous me tuez, soit, vous en avez le pouvoir ; mais ensuite moi j’aurai votre vie. Hélas ! pauvre Fabrice, à quoi cela te servira-t-il ? Quelle différence avec ce jour où je voulus quitter Parme ! et pourtant alors je me croyais malheureuse… quel aveuglement ! J’allais briser toutes les habitudes d’une vie agréable : hélas ! sans le savoir, je touchais à un événement qui allait à jamais décider de mon sort. Si, par ses infâmes habitudes de plate courtisanerie, le comte n’eût supprimé le mot procédure injuste dans ce fatal billet que m’accordait la vanité du prince, nous étions sauvés. J’avais eu le bonheur plus que l’adresse, il faut en convenir, de mettre en jeu son amour-propre au sujet de sa chère ville de Parme. Alors je menaçais de partir, alors j’étais libre ! Grand Dieu ! suis-je assez esclave ! Maintenant me voici clouée dans ce cloaque infâme, et Fabrice enchaîné dans la citadelle, dans cette citadelle qui pour tant de gens distingués a été l’antichambre de la mort ! et je ne puis plus tenir ce tigre en respect par la crainte de me voir quitter son repaire !
Il a trop d’esprit pour ne pas sentir que je ne m’éloignerai jamais de la tour infâme où mon cœur est enchaîné. Maintenant la vanité piquée de cet homme peut lui suggérer les idées les plus singulières ; leur cruauté bizarre ne ferait que piquer au jeu son étonnante vanité. S’il revient à ses anciens propos de fade galanterie, s’il me dit : Agréez les hommages de votre esclave, ou Fabrice périt : eh bien ! la vieille histoire de Judith… Oui, mais si ce n’est qu’un suicide pour moi, c’est un assassinat pour Fabrice ; le benêt de successeur, notre prince royal, et l’infâme bourreau Rassi font pendre Fabrice comme mon complice.
La duchesse jeta des cris : cette alternative dont elle ne voyait aucun moyen de sortir torturait ce cœur malheureux. Sa tête troublée ne voyait aucune autre probabilité dans l’avenir. Pendant dix minutes elle s’agita comme une insensée ; enfin un sommeil d’accablement remplaça pour quelques instants cet état horrible, la vie était épuisée. Quelques minutes après, elle se réveilla en sursaut, et se trouva assise sur son lit ; il lui semblait qu’en sa présence le prince voulait faire couper la tête à Fabrice. Quels yeux égarés la duchesse ne jeta-t-elle pas autour d’elle ! Quand enfin elle se fut convaincue qu’elle n’avait sous les yeux ni le prince ni Fabrice, elle retomba sur son lit et fut sur le point de s’évanouir. Sa faiblesse physique était telle qu’elle ne se sentait pas la force de changer de position. Grand Dieu ! si je pouvais mourir ! se dit-elle… Mais quelle lâcheté ! moi abandonner Fabrice dans le malheur ! Je m’égare… Voyons, revenons au vrai ; envisageons de sang-froid l’exécrable position où je me suis plongée comme à plaisir.
Quelle funeste étourderie ! venir habiter la cour d’un prince absolu ! un tyran qui connaît toutes ses victimes ! chacun de leurs regards lui semble une bravade pour son pouvoir. Hélas ! c’est ce que ni le comte ni moi nous ne vîmes lorsque je quittai Milan : je pensais aux grâces d’une cour aimable ; quelque chose d’inférieur, il est vrai, mais quelque chose dans le genre des beaux jours du prince Eugène !
De loin nous ne nous faisons pas d’idée de ce que c’est que l’autorité d’un despote qui connaît de vue tous ses sujets. La forme extérieure du despotisme est la même que celle des autres gouvernements : il y a des juges, par exemple, mais ce sont des Rassi ; le monstre, il ne trouverait rien d’extraordinaire à faire pendre son père si le prince le lui ordonnait… il appellerait cela son devoir… Séduire Rassi ! malheureuse que je suis ! je n’en possède aucun moyen. Que puis-je lui offrir ? cent mille francs peut-être ! et l’on prétend que, lors du dernier coup de poignard auquel la colère du ciel envers ce malheureux pays l’a fait échapper, le prince lui a envoyé dix mille sequins d’or dans une cassette ! D’ailleurs quelle somme d’argent pourrait le séduire ? Cette âme de boue, qui n’a jamais vu que du mépris dans les regards des hommes, a le plaisir ici d’y voir maintenant de la crainte, et même du respect ; il peut devenir ministre de la police, et pourquoi pas ? Alors les trois quarts des habitants du pays seront ses bas courtisans, et trembleront devant lui, aussi servilement que lui-même tremble devant le souverain.
Puisque je ne peux fuir ce lieu détesté, il faut que j’y sois utile à Fabrice : vivre seule, solitaire, désespérée ! que puis-je alors pour Fabrice ? Allons, marche, malheureuse femme ; fais ton devoir ; va dans le monde, feins de ne plus penser à Fabrice… Feindre de t’oublier, cher ange !
À ce mot, la duchesse fondit en larmes ; enfin, elle pouvait pleurer. Après une heure accordée à la faiblesse humaine, elle vit avec un peu de consolation que ses idées commençaient à s’éclaircir. Avoir le tapis magique, se dit-elle, enlever Fabrice de la citadelle, et me réfugier avec lui dans quelque pays heureux, où nous ne puissions être poursuivis, Paris, par exemple. Nous y vivrions d’abord avec les douze cents francs que l’homme d’affaires de son père me fait passer avec une exactitude si plaisante. Je pourrais bien ramasser cent mille francs des débris de ma fortune ! L’imagination de la duchesse passait en revue avec des moments d’inexprimables délices tous les détails de la vie qu’elle mènerait à trois cents lieues de Parme. Là, se disait-elle, il pourrait entrer au service sous un nom supposé… Placé dans un régiment de ces braves Français, bientôt le jeune Valserra aurait une réputation ; enfin il serait heureux.
Ces images fortunées rappelèrent une seconde fois les larmes, mais celles-ci étaient de douces larmes. Le bonheur existait donc encore quelque part ! Cet état dura longtemps : la pauvre femme avait horreur de revenir à la contemplation de l’affreuse réalité.
Enfin, comme l’aube du jour commençait à marquer d’une ligne blanche le sommet des arbres de son jardin, elle se fit violence. Dans quelques heures, se dit-elle, je serai sur le champ de bataille ; il sera question d’agir, et s’il m’arrive quelque chose d’irritant, si le prince s’avise de m’adresser quelque mot relatif à Fabrice, je ne suis pas assurée de pouvoir garder tout mon sang-froid. Il faut donc ici et sans délai prendre des résolutions.
Si je suis déclarée criminelle d’État, Rassi fait saisir tout ce qui se trouve dans ce palais ; le 1er de ce mois, le comte et moi nous avons brûlé, suivant l’usage, tous les papiers dont la police pourrait abuser, et il est le ministre de la police, voilà le plaisant. J’ai trois diamants de quelque prix : demain, Fulgence, mon ancien batelier de Grianta, partira pour Genève où il les mettra en sûreté. Si jamais Fabrice s’échappe (grand Dieu ! soyez-moi propice ! et elle fit un signe de croix), l’incommensurable lâcheté du marquis del Dongo trouvera qu’il y a du péché à envoyer du pain à un homme poursuivi par un prince légitime, alors il trouvera du moins mes diamants, il aura du pain.
Renvoyer le comte… me trouver seule avec lui, après ce qui vient d’arriver, c’est ce qui m’est impossible. Le pauvre homme ! il n’est point méchant, au contraire ; il n’est que faible. Cette âme vulgaire n’est point à la hauteur des nôtres. Pauvre Fabrice ! que ne peux-tu être ici un instant avec moi, pour tenir conseil sur nos périls !
La prudence méticuleuse du comte gênerait tous mes projets, et d’ailleurs il ne faut point l’entraîner dans ma perte… Car pourquoi la vanité de ce tyran ne me jetterait-elle pas en prison ? J’aurai conspiré… quoi de plus facile à prouver ? Si c’était à sa citadelle qu’il m’envoyât et que je pusse à force d’or parler à Fabrice, ne fût-ce qu’un instant, avec quel courage nous marcherions ensemble à la mort ! Mais laissons ces folies ; son Rassi lui conseillerait de finir avec moi par le poison ; ma présence dans les rues, placée sur une charrette, pourrait émouvoir la sensibilité de ses chers Parmesans… Mais quoi ! toujours le roman ! Hélas ! l’on doit pardonner ces folies à une pauvre femme dont le sort réel est si triste ! Le vrai de tout ceci, c’est que le prince ne m’enverra point à la mort ; mais rien de plus facile que de me jeter en prison et de m’y retenir ; il fera cacher dans un coin de mon palais toutes sortes de papiers suspects comme on a fait pour ce pauvre L… Alors trois juges pas trop coquins, car il y aura ce qu’ils appellent des pièces probantes, et une douzaine de faux témoins suffisent. Je puis donc être condamnée à mort comme ayant conspiré ; et le prince, dans sa clémence infinie, considérant qu’autrefois j’ai eu l’honneur d’être admise à sa cour, commuera ma peine en dix ans de forteresse. Mais moi, pour ne point déchoir de ce caractère violent qui a fait dire tant de sottises à la marquise Raversi et à mes autres ennemis, je m’empoisonnerai bravement. Du moins le public aura la bonté de le croire ; mais je gage que le Rassi paraîtra dans mon cachot pour m’apporter galamment, de la part du prince, un petit flacon de strychnine ou de l’opium de Pérouse.
Oui, il faut me brouiller très ostensiblement avec le comte, car je ne veux pas l’entraîner dans ma perte, ce serait une infamie ; le pauvre homme m’a aimée avec tant de candeur ! Ma sottise a été de croire qu’il restait assez d’âme dans un courtisan véritable pour être capable d’amour. Très-probablement le prince trouvera quelque prétexte pour me jeter en prison ; il craindra que je ne pervertisse l’opinion publique relativement à Fabrice. Le comte est plein d’honneur ; à l’instant il fera ce que les cuistres de cette cour, dans leur étonnement profond, appelleront une folie, il quittera la cour. J’ai bravé l’autorité du prince le soir du billet, je puis m’attendre à tout de la part de sa vanité blessée : un homme né prince oublie-t-il jamais la sensation que je lui ai donnée ce soir-là ? D’ailleurs le comte brouillé avec moi est en meilleure position pour être utile à Fabrice. Mais si le comte, que ma résolution va mettre au désespoir, se vengeait ?… Voilà, par exemple, une idée qui ne lui viendra jamais ; il n’a point l’âme foncièrement basse du prince : le comte peut, en gémissant, contre-signer un décret infâme, mais il a de l’honneur. Et puis, de quoi se venger ? de ce que, après l’avoir aimé cinq ans, sans faire la moindre offense à son amour, je lui dis : Cher comte ! j’avais le bonheur de vous aimer : eh bien, cette flamme s’éteint ; je ne vous aime plus ! mais je connais le fond de votre cœur, je garde pour vous une estime profonde, et vous serez toujours le meilleur de mes amis.
Que peut répondre un galant homme à une déclaration aussi sincère ?
Je prendrai un nouvel amant, du moins on le croira dans le monde. Je dirai cet amant : Au fond le prince a raison de punir l’étourderie de Fabrice ; mais le jour de sa fête, sans doute notre gracieux souverain lui rendra la liberté. Ainsi je gagne six mois. Le nouvel amant désigné par la prudence serait ce juge vendu, cet infâme bourreau, ce Rassi… il se trouverait anobli, et dans le fait, je lui donnerais l’entrée de la bonne compagnie. Pardonne, cher Fabrice ! un tel effort est pour moi au-delà du possible. Quoi ! ce monstre, encore tout couvert du sang du comte P. et de D. ! il me ferait évanouir d’horreur en s’approchant de moi, ou plutôt je saisirais un couteau et le plongerais dans son infâme cœur. Ne me demande pas des choses impossibles !
Oui, surtout oublier Fabrice ! et pas l’ombre de colère contre le prince, reprendre ma gaieté ordinaire, qui paraîtra plus aimable à ces âmes fangeuses, premièrement, parce que j’aurai l’air de me soumettre de bonne grâce à leur souverain ; en second lieu, parce que, bien loin de me moquer d’eux, je serai attentive à faire ressortir leurs jolis petits mérites ; par exemple, je ferai compliment au comte Zurla sur la beauté de la plume blanche de son chapeau qu’il vient de faire venir de Lyon par un courrier, et qui fait son bonheur.
Choisir un amant dans le parti de la Raversi. Si le comte s’en va, ce sera le parti ministériel ; là sera le pouvoir. Ce sera un ami de la Raversi qui régnera sur la citadelle, car le Fabio Conti arrivera au ministère. Comment le prince, homme de bonne compagnie, homme d’esprit, accoutumé au travail charmant du comte, pourra-t-il traiter d’affaires avec ce bœuf, avec ce roi des sots qui toute sa vie s’est occupé de ce problème capital : les soldats de Son Altesse doivent-ils porter sur leur habit, à la poitrine, sept boutons ou bien neuf ? Ce sont ces bêtes brutes fort jalouses de moi, et voilà ce qui fait ton danger, cher Fabrice ! ce sont ces bêtes brutes qui vont décider de mon sort et du tien ! Donc, ne pas souffrir que le comte donne sa démission ! qu’il reste, dût-il subir des humiliations ! il s’imagine toujours que donner sa démission est le plus grand sacrifice que puisse faire un premier ministre ; et toutes les fois que son miroir lui dit qu’il vieillit, il m’offre ce sacrifice ; donc brouillerie complète oui, et réconciliation seulement dans le cas où il n’y aurait que ce moyen de l’empêcher de s’en aller. Assurément, je mettrai à son congé toute la bonne amitié possible ; mais après l’omission courtisanesque des mots procédure injuste dans le billet du prince, je sens que pour ne pas le haïr j’ai besoin de passer quelques mois sans le voir. Dans cette soirée décisive, je n’avais pas besoin de son esprit ; il fallait seulement qu’il écrivît sous ma dictée, il n’avait qu’à écrire ce mot, que j’avais obtenu par mon caractère : ses habitudes de bas courtisan l’ont emporté. Il me disait le lendemain qu’il n’avait pu faire signer une absurdité par son prince, qu’il aurait fallu des lettres de grâce : eh, bon Dieu ! avec de telles gens, avec ces monstres de vanité et de rancune qu’on appelle des Farnèse, on prend ce qu’on peut.
À cette idée, toute la colère de la duchesse se ranima. Le prince m’a trompée, se disait-elle, et avec quelle lâcheté !… Cet homme est sans excuse : il a de l’esprit, de la finesse, du raisonnement ; il n’y a de bas en lui que ses passions. Vingt fois le comte et moi nous l’avons remarqué, son esprit ne devient vulgaire que lorsqu’il s’imagine qu’on a voulu l’offenser. Eh bien ! le crime de Fabrice est étranger à la politique, c’est un petit assassinat comme on en compte cent par an dans ses heureux états, et le comte m’a juré qu’il a fait prendre les renseignements les plus exacts, et que Fabrice est innocent. Ce Giletti n’était point sans courage ; se voyant à deux pas de la frontière, il eut tout à coup la tentation de se défaire d’un rival qui plaisait.
La duchesse s’arrêta longtemps pour examiner s’il était possible de croire à la culpabilité de Fabrice : non pas qu’elle trouvât que ce fût un bien gros péché, chez un gentilhomme du rang de son neveu, de se défaire de l’impertinence d’un histrion ; mais, dans son désespoir, elle commençait à sentir vaguement qu’elle allait être obligée de se battre pour prouver cette innocence de Fabrice. »
 
 

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