La Comtesse de Castiglione au bal du 17 février 1857
Aquilin Schad, peintre ; Louis Pierson (1822-1913), photographe, 1857.
BnF, département des Estampes et de la Photographie, Musée IV
© Bibliothèque nationale de France
Virginia Oldoini Verasis, comtesse de Castiglione (1835-1899), aristocrate née à Florence, mal mariée à un noble piémontais, était parente de Cavour, qui eut l'idée d'utiliser sa beauté et son intelligence au service de la cause italienne en l'envoyant à Paris ; elle y devint la maîtresse de Napoléon III. Elle a inspiré à Zola le personnage de Clorinde Balbi dans Son Excellence Eugène Rougon.
Grande manipulatrice, Clorinde sait séduire Rougon :
"La vérité était qu'il la trouvait gênante, avec son immobilité de statue. Elle semblait si victorieuse, si certaine d'être classiquement belle, que, s'il avait osé, il l'aurait critiquée comme un marbre dont certaines puissances blessaient ses yeux bourgeois ; il aurait préféré une taille plus mince, des hanches moins larges, une poitrine placée moins bas. Puis, une envie d'homme brutal lui vint, celle de la prendre au mollet. Il dut s'éloigner davantage, pour ne pas céder à cette envie.
‘Vous avez assez vu ? demanda Clorinde, toujours sérieuse et convaincue. Attendez, voici autre chose.’ Et, brusquement, elle ne fut plus Diane. Elle laissa tomber son arc, elle fut Vénus. Les mains rejetées derrière la tête, nouées dans son chignon, le buste renversé à demi, haussant les pointes des seins, elle souriait, ouvrait à demi les lèvres, égarait son regard, la face comme noyée tout d'un coup dans du soleil. Elle paraissait plus petite, avec des membres plus gras, toute dorée d'un frisson de désir, dont il semblait voir passer les moires chaudes sur sa peau de satin. Elle était pelotonnée, s'offrant, se faisant désirable, d'un air d'amante soumise qui veut être prise entière dans un embrassement.
M. Brambilla, M. Staderino et M. Viscardi, sans quitter leur raideur noire de conspirateurs, l'applaudirent gravement.
‘Brava ! brava ! brava !’
M. La Rouquette éclatait d'enthousiasme, tandis que le chevalier Rusconi, qui s'était rapproché de la table, pour tendre la cigarette à la jeune fille, restait là, le regard pâmé, avec un léger balancement de la tête, comme s'il battait le rythme de son admiration.
Rougon ne dit rien. Il noua si fortement ses mains, que les doigts craquèrent. Un léger frisson venait de lui courir de la nuque aux talons. Alors, il ne songea plus à s'en aller, il s'installa."
 
 

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