L'immeuble de la Goutte-d'Or
L'Assommoir
Émile Zola (1840-1902), auteur, Paris, Ed. Fasquelle, 1906.
BnF, département Littérature et Art, RES G- Y2- 545, p. 25
© Bibliothèque nationale de France
Zola se fixe un objectif dans l’ébauche de son roman L'Assommoir : “Le roman doit être ceci : montrer le milieu peuple, et expliquer par ce milieu les mœurs peuple ; comme quoi, à Paris, la soûlerie, la débandade de la famille, les coups, l'acceptation de toutes les hontes et de toutes les misères vient des conditions mêmes de l'existence ouvrière, des travaux durs, des promiscuités, des laisser-aller, etc. En un mot, un tableau très exact de la vie du peuple avec ses ordures, sa vie lâchée, son langage grossier ; et ce tableau ayant comme dessous, – sans thèse cependant – le sol particulier dans lequel poussent toutes ces choses. Ne pas flatter l'ouvrier, et ne pas le noircir. Une réalité absolument exacte. Au bout, la morale se dégageant elle-même. Un bon ouvrier fera l'opposition, ou plutôt non ; ne pas tomber dans le manuel. Un effroyable tableau qui portera sa morale en soi.
Ma Gervaise Macquart doit être l'héroïne. Je fais donc la femme du peuple, la femme de l'ouvrier. C'est son histoire que je conte. Son histoire est celle-ci. Elle s'est sauvée de Plassans à Paris avec son amant Lantier, dont elle a deux enfants, Claude et Étienne. Elle se sauve en 50. Elle a alors 22 ans. Claude a 8 ans et Étienne 4 ans. Lantier, un ouvrier tanneur l'abandonne trois mois après son arrivée à Paris, où elle a repris son état de blanchisseuse ; il se marie de son côté, sans doute. Elle se met avec Coupeau, un ouvrier zingueur qui l'épouse. Elle en a tout de suite une fille, Anna, en 51. Je la débarrasse de Claude, dès que celui-ci a 10 à 12 ans. Je ne lui laisse qu'Étienne et Anna. Au moment du récit, il faut qu'Anna ait au moins 14 ans, et Étienne 18 ans. Mon drame aura donc lieu vers 1865. Je raconterai auparavant la vie de Gervaise.

Je pourrai prendre sans doute pour cadre la vie d'une femme du peuple, je prends Gervaise à Paris à 22 ans (en 1850) et je la conduis jusqu'en 1869 à 41 ans. Je la fais passer par toutes les crises et toutes les hontes imaginables. Enfin, je la tue, dans un drame.”
 
 

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