Au Bonheur des Dames
Manuscrit, deuxième volume
Émile Zola (1840-1902), auteur, 1881.
BnF, département des Manuscrits, NAF 10276, fol. 571
© Bibliothèque nationale de France
« C’était une pièce assez vaste, tendue de soie rouge, meublée d’une toilette de marbre, et d’une armoire à trois corps, aux larges glaces. Comme la fenêtre donnait sur la cour, il y faisait déjà sombre ; et l’on avait allumé deux becs de gaz, dont les bras nickelés s’allongeaient, à droite et à gauche de l’armoire.
— Voyons, dit Henriette, ça va mieux marcher peut-être.
En entrant, Mouret avait trouvé Denise toute droite, au milieu de la vive lumière. Elle était très pâle, modestement serrée dans une jaquette de cachemire, coiffée d’un chapeau noir ; et elle tenait, sur un bras, le manteau acheté au Bonheur. Lorsqu’elle vit le jeune homme, ses mains eurent un léger tremblement.
— Je veux que monsieur juge, reprit Henriette. Aidez-moi, mademoiselle.
Et Denise, s’approchant, dut lui remettre le manteau. Dans un premier essayage, elle avait posé des épingles aux épaules, qui n’allaient pas. Henriette se tournait, s’étudiait devant l’armoire.
— Est-ce possible ? Parlez franchement.
— En effet, madame, il est manqué, dit Mouret, pour couper court. C’est bien simple, mademoiselle va vous prendre mesure, et nous vous en ferons un autre.
— Non, je veux celui-ci, j’en ai besoin tout de suite, reprit-elle avec vivacité. »
 
 

> partager
 
 

 
 

 
> copier l'aperçu