Au Bonheur des Dames
Manuscrit, deuxième volume
Émile Zola (1840-1902), auteur, 1881.
BnF, département des Manuscrits, NAF 10276, fol. 401
© Bibliothèque nationale de France
« — Plus tard, répondit-il, lorsque je serai en mesure de tenir mes promesses.
Elle n’eut pas un geste, elle dit seulement :
— Notre fille en mourra.
Baudu se retint, soulevé de colère. C’était lui, qui en mourrait, si on le bouleversait ainsi continuellement ! Était-ce sa faute ? Il aimait sa fille, il parlait de donner son sang pour elle ; mais il ne pouvait pas cependant faire que la maison marchât, quand elle ne voulait plus marcher. Geneviève devait avoir un peu de raison et patienter jusqu’à un meilleur inventaire. Que diable ! Colomban restait là, personne ne le lui volerait !
— C’est incroyable ! répétait-il, une fille si bien élevée ! Madame Baudu n’ajouta rien. Sans doute elle avait deviné les tortures jalouses de Geneviève ; mais elle n’osa les confier à son mari. Une singulière pudeur de femme l’avait toujours empêchée d’aborder avec lui certains sujets de tendressse délicate. Quand il la vit muette, il tourna sa colère contre les gens d’en face, il tendait les poings dans le vide, du côté du chantier, où l’on posait, cette nuit-là, des charpentes de fer, à grands coups de marteau. »
 
 

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