Au Bonheur des Dames
Manuscrit, premier volume
Émile Zola (1840-1902), auteur, 1881.
BnF, département des Manuscrits, NAF 10275, fol. 243
© Bibliothèque nationale de France
« — Ah bien ! reprit l’autre, elle a dû en pleurer... C’étaient les galoches de sa mère.
D’ailleurs, un soulèvement général se produisit contre Denise. Le comptoir avait fini par découvrir son amitié avec Pauline, et il voyait une bravade dans cette affection donnée à une vendeuse d’un comptoir ennemi. Ces demoiselles parlaient de trahison, l’accusaient d’aller répéter à côté leurs moindres paroles. La guerre de la lingerie et des confections en prit une violence nouvelle, jamais elle n’avait soufflé si rudement : des mots furent échangés, raides comme des balles, et il y eut même une gifle, un soir, derrière les cartons des chemises. Peut-être, cette lointaine querelle venait-elle de ce que la lingerie portait des robes de laine, lorsque les confections étaient vêtues de soie ; en tous cas, les lingères parlaient de leurs voisines avec des moues révoltées d’honnêtes filles ; et les faits leur donnaient raison, on avait remarqué que la soie semblait influer sur les débordements des confectionneuses. Clara était souffletée du troupeau de ses amants, Marguerite elle-même avait reçu son enfant à la tête, tandis qu’on accusait madame Frédéric de passions cachées. Tout cela à cause de cette Denise ! »
 
 

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