L'Embarquement pour Cythère
Nicolas Henri Tardieu (1674-1749), graveur, d'après Antoine Watteau (1684-1721), peintre, vers 1720.
Eau-forte et burin, 50 x 72 cm
BnF, Estampes et photographie, AA5 Rés. Tardieu
© Bibliothèque nationale de France
Cythère est une île grecque réelle, située dans la mer Ionienne. Dans la mythologie, c’est là qu’Aphrodite, déesse de l’amour, fut portée par les zéphyrs immédiatement après sa naissance. Cythère apparaît peu dans la mythologie grecque, mais l’art occidental a exploité l’idée de l’île consacrée à l'amour et prolongé le mythe : elle devint une île enchantée, réservée aux plaisirs de l'amour et métaphore de l’érotisme.
Au XVIIIe siècle, le thème de l’île est très en vogue : outre la métaphore amoureuse qui fait de l'île le lieu intime des amants, isolés du monde, l'île sert souvent de cadre à des utopies politiques, comme chez Marivaux.
Watteau exploita plusieurs fois cette métaphore.
Cette estampe est réalisée d'après une œuvre très célèbre de Watteau qui lui valut d'être élu à l'Académie en 1717. Elle fut enregistrée comme "Pèlerinage à l'Isle de Cythère" : évocation religieuse, quasi mystique de ce qui représente un embarquement pour l' "île d'Amour". Pas de frénésie ni d'agitation, mais une ambiance de langueur lascive et de troublante sérénité, dans laquelle les femmes se laissent emmener par leurs compagnons avec une passivité consentante, malgré quelques gestes de retenue à peine ébauchés. Arrivés à la berge, parmi des spirales de nuées et de guirlandes, ces pèlerins sont entraînés vers une barque à peine esquissée par des angelots virevoltant dans les airs. Cette barque évoque davantage un lit à baldaquin qu'un navire prêt pour une expédition lointaine : incitation, au-delà des interprétations savantes, à rêver à ces îles du bonheur perpétuel et à ces voyages dont on revient changé et qui, selon la formule de Montaigne, "forment la jeunesse".
 
 

> partager
 
 
 

 
> copier l'aperçu
 
 
> commander