Cauchemar multiforme et sans trêve
Suite complète de neuf planches sur Les Fleurs du Mal , pl.6
Odilon Redon (1840-1916), graveur, Bruxelles, Edmond Deman, 1890.
Estampe, impression photomécanique par le procédé sur cuivre d'Évely ; 21,2 x 18,7 cm (le motif), 44,7 x 30,8 cm (la feuille)
BnF, Estampes et photographie, Rés. DC- 354 (11) -BOITE FOL
© Bibliothèque nationale de France
Le fou occupe une vraie place dans la société médiévale, qui éprouve de la compassion pour les simples. Il est largement accepté par les hommes parmi lesquels il vit. Auprès du roi, le "bouffon" a fonction de contre-pouvoir, faisant passer des messages sous le prétexte de la folie. Mais le fou incarne également les faiblesses des hommes, leurs vices et leur inconséquence, renvoyant chacun à ses doutes et à ses angoisses.
Si, à la fin du Moyen Âge, on peut voir dans la folie une manifestation du diable, c'est au XIXe siècle, comme l'a montré Michel Foucault, que la folie change de statut : le fou, considéré comme un déviant, doit être soigné et hospitalisé, voir incarcéré et criminalisé. Le mal a pris en quelque sorte possession du corps : il faut l'en extirper.

Les visions nocturnes d'Odilon Redon témoignent de ces tourments intérieurs. C'est à travers une de ses "ombres" que l'artiste interprète ici les premiers vers du poème "Le Gouffre" de Baudelaire :
Sur le fond de mes nuits, Dieu, de son doigt savant
Dessine un cauchemar multiforme et sans trêve

Il livre ainsi une suite de neuf planches consacrées aux Fleurs du mal dont il dit qu'elles sont des "interprétations" plutôt que des illustrations.
 
 

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